Vérifications insuffisantes par le créancier professionnel et inopposabilité du cautionnement disproportionné
Publié le :
05/10/2023
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Lorsqu’une personne physique souscrit un cautionnement au bénéfice d'un créancier professionnel, celui-ci doit prendre garde à ce que cet engagement soit proportionnel à ses revenus et à son patrimoine. À défaut, le cautionnement souscrit peut perdre tout son intérêt pour le créancier.
En effet, depuis l’ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021 portant réforme du droit des sûretés, la caution dont l’engagement est disproportionné peut voir celui-ci réduit à hauteur du montant auquel elle était en mesure de s’engager à cette date. Concernant les cautionnements souscrits avant l’entrée en vigueur de cette ordonnance, le risque est encore plus grand puisque le cautionnement disproportionné n’était pas opposable à la caution, sauf si son patrimoine s’est suffisamment enrichi au moment où elle est appelée.
À cet égard, le créancier professionnel doit donc procéder à des vérifications relatives au patrimoine de la personne physique souhaitant se porter caution en prenant en compte tant son actif que son passif. La Cour de cassation est venue apporter des précisions concernant l’étendue des vérifications à effectuer.
En l’espèce, une banque avait accordé un prêt immobilier à une société dont le gérant personne physique s’était porté caution solidaire en 2007. Les difficultés rencontrées par la société ayant privé l’établissement de crédit du paiement des mensualités du prêt, il a fait procéder à la vente forcée de l’immeuble avant d’assigner la caution en paiement du solde restant dû.
Ces demandes ont pourtant été rejetées par les juges du fond, aux motifs que le cautionnement en cause était manifestement disproportionné au regard des engagements préalablement souscrits par le gérant, qui pesaient sur sa situation patrimoniale, et que la banque aurait dû prendre en compte en établissant une fiche de renseignement patrimoniale complète.
Au contraire, l’établissement de crédit estimait avoir procédé à des vérifications suffisantes en interrogeant la caution sur sa situation personnelle et professionnelle, ses revenus et ses charges. Elle contestait que la caution puisse se prévaloir d’engagements antérieurs pour diminuer sa situation patrimoniale par rapport à celle qu'elle avait déclarée à la banque pour souscrire le cautionnement et obtenir l’emprunt au profit de sa société. Aussi, elle s’est pourvue en cassation.
En premier lieu, la Cour de cassation rappelle qu’aux termes de l'article L. 341-4 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016, l’existence d’une fiche de renseignements certifiée exacte par la caution autorise le créancier à s’y fier, sauf anomalies apparentes, et le dispense donc de vérifier l’exactitude des déclarations contenues dans ladite fiche.
Elle relève ensuite que la Cour d’appel qui a constaté que l’établissement de crédit s’est contenté de fournir la demande de prêt signé par la caution personne physique, en sa qualité de représentant de la personne morale emprunteuse, a retenu à bon droit que les seules informations fournies ne dispensaient pas le créancier professionnel de plus amples vérifications.
Par conséquent, la banque, qui aurait dû vérifier les déclarations, ne peut opposer à la caution personne physique, le cautionnement disproportionné, en vertu d’engagements antérieurs non pris en compte dans l’appréciation de la situation patrimoniale de la caution lors de la souscription du cautionnement.
Référence de l’arrêt : Cass. civ. 1ère du 12 juillet 2023, n° 22-11.357.
Historique
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